Lancement d’une pétition citoyenne en faveur d’une exception alimentaire

Cette pétition a pour objectif de porter la question de l’exception alimentaire dans le but de revendiquer une modification des règles relatives aux marchés publics en ce qui concerne l’alimentation et l’agriculture. Cette pétition vise à souligner l’importance et l’impact positif que l’exception alimentaire pourrait avoir pour la relocalisation de notre alimentation. Elle est destinée à unir le monde citoyen, associatif et politique autour de cette question afin de l’élever au niveau européen de la manière la plus massive, cohérente et légitime possible. Elle s’inscrit en parallèle à d’autres initiatives similaires qui voient le jour au-delà de nos frontières et notamment en France.

Acheter des pommes, des poires ou des carottes est-ce vraiment la même chose que d’acheter des ordinateurs, des fournitures de bureau ou des vêtements de travail ?

Vous pensez que non ? C’est pourtant la manière dont l’alimentation est aujourd’hui considérée par les règles du libre-échange européen et notamment par le droit des marchés publics : des marchandises ordinaires soumises à la loi du marché et du commerce international.

La règlementation européenne en matière de marchés publics empêche ainsi une crèche, une école, un hôpital, une maison de repos ou toute autre collectivité publique de choisir librement la provenance des aliments qu’elle souhaite proposer dans sa cantine et lui interdit par conséquent de privilégier dans ses critères d’achat des produits provenant d’agriculteurs locaux.

En outre, ces règles imposent des procédures complexes qui s’avèrent bien souvent beaucoup trop lourdes administrativement pour les collectivités mais aussi et surtout pour les producteurs (agriculteurs, éleveurs, artisans, transformateurs, …) qui voudraient fournir ces cantines. Au-delà d’un certain montant, les marchés doivent impérativement être publiés et sont ouverts à tout opérateur intéressé. Les collectivités doivent alors imposer dans leur cahier des charges une multitude de critères garantissant la qualité de l’offre retenue mais réclamant autant de preuves à réunir par les producteurs. Ces derniers, faute de temps, de moyens et même plus généralement de compréhension des procédures, préfèrent, dès lors, ne pas y répondre.

La restauration collective constitue pourtant un levier important pour la transition de nos systèmes alimentaires. En effet, plus de 200.000 repas chauds y sont servis chaque jour. La Commission européenne ne s’y est d’ailleurs pas trompée en mettant l’accent sur la restauration collective dans sa stratégie « De la fourche à la fourchette » (« Farm to Fork ») avec comme objectif l’augmentation et l’amélioration de l’approvisionnement en denrées alimentaires durables dans nos cantines.

La volonté légitime de relocaliser notre alimentation et de retrouver une souveraineté sur nos choix alimentaires se trouve donc grandement freinée par le droit des marchés publics, inadapté à l’alimentation, et plus particulièrement à l’alimentation durable. Certaines collectivités, particulièrement créatives et ingénieuses, tentent malgré tout de s’adapter en contournant tant bien que mal ces obstacles mais au prix d’efforts risqués et chronophages.

Les méthodes agricoles employées au sein de l’Union européenne et plus largement au niveau mondial sont évidemment très diversifiées et fortement liées au territoire sur lequel sont implantés les agriculteurs. Ces méthodes découlent bien entendu d’un ancrage culturel propre à chaque région mais les agriculteurs sont également soumis à des normes d’ordre social, environnemental ou encore de bien-être animal différentes en fonction de leur région. Il est donc tout à fait primordial que chaque collectivité puisse librement choisir les modes d’agriculture qui lui correspondent localement et qu’il est parfois difficile de valoriser à travers les procédures de marchés publics ouvertes à l’ensemble des acteurs européens.

Face aux crises que nous traversons actuellement et qui frappent de plein fouet nos agriculteurs, il est primordial que la commande publique puisse, particulièrement durant cette période difficile, les soutenir et leur assurer une sécurité pérenne en termes de débouchés.

Face à cette impasse, l’objectif de l’exception alimentaire apparaît donc évident : offrir à l’alimentation et à l’agriculture un régime spécifique au sein des règles de commerce international, de libre concurrence et plus spécifiquement celles des marchés publics.

Concrètement, les collectivités pourraient alors, pour tout ou pour une partie de leurs achats alimentaires, choisir librement l’origine géographique de ceux-ci. Généraliser, pour les marchés d’alimentation, des procédures moins lourdes administrativement et ne nécessitant pas de publication permettrait également d’attirer plus facilement les petits producteurs vers les cuisines de collectivité.

L’exception alimentaire, en permettant l’introduction de critères liés à la proximité géographique, ne serait pas pour autant synonyme de protectionnisme ou d’autarcie. Les cantines auront toujours la possibilité d’acheter des produits qui viennent de plus loin (qu’ils soient ou non, d’ailleurs, également produits chez nous), l’exception alimentaire leur permettra simplement d’avoir le choix et de retrouver une souveraineté sur leur approvisionnement.

Parallèle avec l’exception culturelle

Aujourd’hui, le monde culturel bénéficie déjà d’une telle exception aux règles du commerce international. Par l’imposition d’un prix unique du livre, les libraires indépendants peuvent continuer d’exister aux côtés des grosses chaines de librairies ou des plateformes numériques de vente en ligne. En imposant un certain quota de financement des productions audiovisuelles nationales ou régionales aux chaînes de télévision, il est encore possible de profiter de films ou séries 100% belges aux côtés des maxi-productions hollywoodiennes. 

L’exception culturelle est basée sur le principe simple que la culture est vitale pour l’esprit et qu’elle ne peut donc être appréhendée entièrement par les lois du marché. A l’instar de la culture, l’alimentation étant vitale pour le corps devrait, de la même manière, échapper à la marchandisation. 

Engagez-vous !

L’exception alimentaire c’est avant tout reconnaître le caractère tout à fait spécifique de l’alimentation, dans sa dimension évidemment vitale mais aussi culturelle, sociale, sociétale, environnementale et refuser de la réduire à une simple valeur commerciale.

L’exception alimentaire, c’est donner un avenir à notre agriculture familiale wallonne ainsi qu’à nos transformateurs, en traversant les crises plus sereinement.

L’exception alimentaire c’est encourager la mise en place d’une véritable politique publique cohérente d’alimentation durable à l’échelle des territoires.

L’exception alimentaire, c’est vouloir favoriser le rapprochement des collectivités publiques avec les producteurs du territoire dans des partenariats d’approvisionnement durable.

L’exception alimentaire, c’est enfin redonner aux collectivités les moyens de retrouver une véritable souveraineté alimentaire.

L’exception alimentaire est une revendication soutenue par de plus en plus d’acteurs de l’alimentation, allant du milieu associatif aux autorités publiques. Elle a également fait l’objet, en France d’une Tribune dans le journal Libération et d’une pétition portée par le collectif « Un plus Bio » (https://www.unplusbio.org/notre-tribune-exception-alimentaire/).

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